Web 2.0 et banque

Pour son mémoire de fin d’étude de Master Banque Finance et Assurance à Paris X, j’ai discuté avecSandra Peru du sujet « web 2.0 dans les banques et assurances » et plus particulièrement les raisons du constat du faible développement du web 2.0 dans ce secteur.

Pour la définition du web2.0, je l’ai déjà évoquée dans une précédente note (web 2.0 en entreprise avec MOSS 2007) :

  • Participation des utilisateurs (« user generated content »)
  • Enrichissement de l’interaction et de l’expérience utilisateur quelque soit le canal (web, desktop, mobile,…)
  • Création d’applications par composition (« mashup ») à partir de services mis à disposition sur internet (« web as a platform ») renforçant le pouvoir des utilisateurs avancés (« power users »)
  • Emergence d’un nouveau modèle, la « long tail », permettant de s’adapter à la personnalisation et à la dispersion des contenus, services et audiences.

 

Ces caractéristiques sont-elles applicables à la banque ?

La participation des utilisateurs n’est pas dans le culture des banques :

  • Si l’on distingue l’amont, la conception et la planification des projets et dépenses, et l’aval, la mise en place d’outils de financement et d’échange financier, les banques ne sont présentes que sur l’aval et pas sur l’amont.
  • Les banques perçoivent même la participation comme une menace car elle permet aux utilisateurs d’une même banque de faire des comparaisons sur des éléments chiffrés entre eux, voire avec des utilisateurs d’autres banques et ainsi de renforcer l’intensité de la concurrence dans le secteur.
  • Les leviers de développement dans le secteur sont encore importants et si les banques perçoivent la nécessité d’innover, elles n’en perçoivent pas forcement l’urgence à court terme. Leur stratégie serait plutôt de tirer parti le plus longtemps possible des bénéfices du modèle traditionnel et de n’évoluer que lorsque le marché aura validé la pertinence et le potentiel de croissance des nouveaux modèles. La question de timing est cruciale car si France Telecom n’avait pas su développer l’ADSL au détriment de ses revenus traditionnels du téléphone fixe lorsque le marché était émergent, il ne serait probablement pas l’opérateur télécom ayant le mieux réussi sa transition en Europe.
  • Des premières expérimentations existent en France sur des positionnements plus de « dialogue d’entreprise » (Bénéfices futurs de la Caisse d’Epargne, l’opération « Si j’étais banquier » du Credit Mutuel ou le site « votre point de vue » de HSBC) mais pas de participation directe entre utilisateurs.

L’enrichissement de l’interaction et de l’expérience utilisateur me semble être une évolution en cours dans les banques. Beaucoup de celles-ci ont engagé des projets de refonte de leurs sites internet, de développement d’applications mobiles et de réflexion sur l’amélioration de l’expérience utilisateur.

On ne peut que regretter que la réflexion n’aille pas au-delà jusqu’à mettre à disposition des clients des outils afin de mieux piloter et maîtriser sa relation bancaire :

  • Suivre ses frais bancaires
  • Paramétrer et suivre des seuils de dépense
  • Définir des règles de virement de fond ou d’allocation de ressources
  • Affecter des « tags » (des catégories) à certaines dépenses et suivre graphiquement l’évolution de ses structures de dépenses
  • Sans parler de pouvoir comparer des éléments au sein de groupes privés ou ouverts d’utilisateurs (mais c’est une autre histoire).

La création d’applications par composition et l’émergence d’un nouveau modèle, la « long tail » renvoient aux business models de la banque et non à des problématiques technologiques.

La banque est aujourd’hui dans un modèle intégré en « jardin clos » (« wall garden ») alors que l’évolution la conduit dans un modèle intermédié :

  • Un modèle où tous les produits et services ne sont pas fournis par la banque mais peuvent être « assemblés » à partir de produits et services externes : assurances, instruments de placement (SICAV), courtage,…
  • Un modèle où une segmentation marketing et une personnalisation des offres plus avancées conduiront à distribuer ses produits et services via des partenaires de distribution à valeur ajoutée (conseil, connaissance du marketing de micro-segments clients, nouveaux modes de distribution par exemple via des réseaux sociaux,…)
  • Et je ne parle pas des modèles de prêt de particulier à particulier à la Prosper ou Zopa car, là encore, c’est une autre histoire (mais dont les banques ne sont pas nécessairement absentes comme le montre les partenariats de Zopa avec les banques mutualistes US). Le sujet est d’ailleurs un des plus populaire discuté sur le site Bénéfices futurs de la Caisse d’Epargne ouvert à l’échange avec les utilisateurs (« Prêt de particulier à particulier »).