Dans mon précedent billet, j’ai avancé qu’il y a un potentiel très intéressant dans l’hybridation du modèle éditorial traditionnel en intégrant du « user generated content » sans remettre en cause pour autant les fondements de ce modèle. Les UGC correspondent à une attente des internautes et ils attirent de l’audience. Tirer partie de cette force d’attraction est un levier d’amélioration pour un site editorial.
La question devient : comment intégrer des contenus UGC dans un site éditorial ?
De multiples moyens peuvent être identifiés :
– Les journalistes peuvent publier leurs articles sous forme de blogs (les medias technologiques comme ZDNet le pratiquent depuis longtemps)
– Les éditoriaux peuvent être publiés sous forme de blogs
– Les articles peuvent ouvrir des espaces pour les commentaires des internautes
– Des blogs peuvent être ouverts par les internautes dans des espaces UGC identifiés au sein du site
– Des contenus peuvent être soumis aux journalistes par les internautes.
– etc…
L’ouverture aux UGC peut faire reculer un media editorial qui peut craindre d’être dépassé par des contenus qui ne suivent pas les règles de qualité et de déontologie qu’il s’applique et qui remet en cause la place des journalistes dans le processus éditorial.
A ces deux points, il est possible de répondre :
– Qu’il est important de tracer et d’afficher la source et la nature des contenus présentés (pur UGC, UGC repris et intégrés dans un processus éditorial, contenus éditoriaux présentés sous une forme UGC – c’est à dire ouvert à la discussion, à l’évaluation et au partage- et contenus éditoriaux traditionnels). En conséquence, il est nécessaire d’intégrer le suivi de l’origine et des transformations des contenus dans la chaine éditoriale de production et dans la présentation sur le site.
– Que la valeur ajoutée des journalistes ne réside pas seulement dans la production du contenu mais aussi dans sa sélection, sa mise en forme et sa présentation dans un ensemble éditorial, toutes choses que n’assurent pas les producteurs d’UGC.
La prise en compte des contenus UGC dans les sites éditoriaux est facilité, par ailleurs, par le fait que les internautes sont majoritairement intéressés par la consommation de ce type de contenu et non leur production.
Une étude Hitwise, citée par IDG, montre ainsi que 1% des internautes créent le contenu, 9% le partagent et 90% le consomment.
Jeremy Liew de Lightspeed Ventures distingue, de même, trois catégories d’utilisateurs :
– Creator : les internautes qui produisent des contenus (blogs, video, articles,…)
– Curator (vote/digg/rate) : Les internautes qui enrichissent des contenus existants ou facilitent l’accès à ces contenus notamment en partageant des éléments par le biais de recommandations, évaluations, votes, partage de bookmarks, etc…
– Consumer : les internautes qui consomment des contenus UGC.
Le volume des contenus UGC réellement manipulés est donc extremement réduit par rapport aux audiences des sites UGC. La volumétrie considérée est alors compatible avec leur introduction dans des cycles de publication tels que les connaissent les medias éditoriaux. Les contenus UGC pertinents peuvent alors être captés à la source. Un bon exemple réside dans le site de photographie de presse UGC iStock-Photo qui appartient à l’agence photo Getty et dont les meilleurs contributeurs sont transférés dans cette dernière.
Le site éditorial d’USAToday illustre parfaitement ce qu’il est possible de faire en exploitant tous les ressorts (notamment UGC) pour réinventer un modèle (qu’ils dénomment “networked journalism project”) :
– Contenus des blogs promus en première page
– Articles éditoriaux publiés sous forme de blog
– Blog de la rédaction (équivalent éditorial)
– Possibilités généralisées de commenter, bloguer, noter et taguer les contenus editoriaux
– Accès multiples aux contenus : Editorial, blogs, “most popular”, photos, videos,
– Pages personnelles : activités, messages, relations,…
Les résultats de la refonte du site USA Today (en ligne depuis mars 2007) ont été :
– Une augmentation de l’audience de 21%
– Une augmentation des inscriptions des internautes de 380%
– « a majority of their readers come back every day — multiple times a day, in fact. That is quite unusual for newspaper sites » (Kinsey Wilson, editor USA Today cité par BuzzMachine)
(Les liens vers les sources proviennent de Media 2.0).
Une prochaine illustration en France ?