L’ouverture du marché du crowdfunding en France est en marche comme je le présentais dans le précédent article « Nouveau cadre juridique du financement participatif« .
Arnaud Montebourg, Ministre de l’Economie, du Redressement Productif et du Numérique, en charge du dossier, est intervenu à la Fête du Crowdfunding le 17 mai 2014 et a annoncé :
– Que le texte de l’ordonnance serait présenté en conseil des ministres le 28 mai
– Que les décrets d’applications seraient publiés en juillet.
Eu égard au temps de mise en place des agréments prévus dans l’ordonnance (Conseiller en Investissement Participatif et Intermédiaire en Financement Participatif), on se situe à l’horizon de septembre 2014. Prêt PME, le projet de plateforme auquel je participe, ouvrira en septembre 2014 complètement alignée sur la nouvelle loi.
– Qu’un fonds d’abondement pour les plateformes de financement en prêt et en capital dans les entreprises serait crée pour favoriser le financement des entreprises sur le modèle de ce qui a été fait en Angleterre (British Business Bank Investment Programme). Il consiste par exemple à financer une quote part automatique de 20% sur tous les prêts financés à 80% sur une plateforme de prêts telle que Funding Circle.
– Que les prochaines Assises du Financement Participatif seront organisées en décembre 2014 pour suivre l’évolution de ce marché.
Le texte de l’ordonnance est consultable sur le site de l’Agefi.
Une bonne analyse en a été faite par Hubert de Vauplane et Reid Fledman de Kramer et Levin.
Les principaux points à noter sont les suivants :
– Les statuts de Conseiller en Investissement Participatif (pour le capital) et d’Intermédiaire en Financement Participatif s’acquerront par dossier de déclaration auprès de l’ORIAS (Registre unique des intermédiaires en Assurance, Banque et Finance). L’accès devrait en être relativement ouvert (sur contraintes de diplôme, charte de transparence et de déontologie, assurance professionnelle et obligation de déclaration de soupçon typiquement). Il entraîne une cotisation mais très limitée (30€ pour l’ORIAS et 150€ pour frais de contrôle de l’ACPR en 2012).
Concernant le prêt et le statut d’IFP :
– Seules les personnes physiques pourront bénéficier de la dérogation. Les entreprises et les associations ne pourront pas contribuer ou se prêter entre elles (eu égard au seuil de 1000€, cela n’aurait pas eu beaucoup de sens).
– Seuls les projets professionnels de personnes physiques ou morales sont concernés, ainsi que les projets de formation de personnes physiques. Le crédit à la consommation ou immobilier sont donc exclus du champ (à moins de passer par une société pour ce dernier).
– Le statut est rendu obligatoire pour les prêts sans intérêt et optionnel pour les dons. Les prêts sans intérêt ne constituent pas dans le code monétaire et financier français des opérations de crédit. Il s’agit d’une spécificité française et l’obligation du statut d’IFP ne constitue donc qu’une « renormalisation » de cette situation.
– Le statut d’IFP est compatible avec les statuts de banque, établissement de paiement (et monnaie électronique), prestataire de service d’investissement, agent d’un établissement de paiement. Un IFP peut aussi être CIP mais le statut de CIP, comme celui de Conseil en Investissement Financier dont il dérive entraîne des contraintes liées à son caractère d’exemption de la Directive Européenne MIF, à savoir qu’il n’est ni passeportable en Europe ni compatible avec un statut passeportable comme celui d’établissement de paiement. La question reste ouverte de la compatibilité avec le statut d’Intermédiaire en Opérations Banque et en Services de Paiement (IOBSP). Le statut d’IOBSP étant moins extensif que celui d’agent, il devrait être autorisé ou à tout le moins réalisable via un mandat d’agent.
– « La Banque de france peut communiquer tout ou partie des renseignements quelle détient sur la situation financière des entreprises » a priori, il s’agit du fichier FIBEN (maisdont l’accès est actuellement payant).
– A la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance (1er juillet 2014), les plateformes concernées ont 3 mois pour régulariser leurs situations en acquérant les agréments correspondants.
– Le régime prudentiel allégé des établissements de paiement est intégré dans l’ordonnance.